jeudi 4 décembre 2008

Jour 43 : Fluctua Nec Mergitur

Il est huit heures précises. Mon taxi file sur les quais, direction Roissy. Je regarde le quinzième défiler la tête contre la vitre : ça change pas, c'est toujours aussi dégueulasse. Ce matin c'est ça Paris : un ciel morne, des tours ternes et des réverbères qui s'éteignent. Je m'échappe d'une ville fantôme engluée dans un printemps pisseux... Ca va faire six mois que ça dure, à croire que l'hiver a doublé la mise! Six mois que j'ai tendance à voir mon verre à moitié vide. Six mois que je picolle à force d'essayer de le remplir! Ma vie, je sais plus quoi en faire... De loin, elle a des airs de fête, on dirait presque qu'elle pétille.... Elle a des airs de grande dame... Seulement, quand on zoome sur les détails, ça fout le blues... Elle ressemble à une pute qui baise plus... Elle ressemble au reflet ce putain de ciel mort sur la seine : sombre et boueux ! Fluctua nec mergitur ? Mon cul ! Le bateau coule et le capitaine a sauté avec la dernière bouée...

La voiture n'avance plus, on est bloqué depuis plus de vingt minutes : bloqué par le flux des travailleurs matinaux, pris au piège par le chassé-croisé des banlieusards. Je regarde frénétiquement l'heure sur mon portable, pour constater que ces salopes de minutes n'arrêtent pas d'avancer. Dans quatre mille cinq cents secondes, il sera trop tard pour prendre mon vol. A cause de ces connards, je vais louper mon avion. Je vais louper mon avion. Je vais louper mon avion. Je vais louper mon avion. Mon cerveau est acculé par ces cinq mots, il dégueule ces vingt lettres ! Je suis stressé, j'arrête pas de demander au chauffeur si ça va le faire. Il s'en fout ! La course est plus chère quand on s'occupe de vos problèmes ?

Voilà, c'est fait, j'ai l'air d'un con! On dirait un provincial qui rentre chez lui. Pour couronner le tout, j'ai du mal à articuler... J'arrive même plus à faire des phrases correctes... Il devrait se foutre de ma gueule derrière son volant... Et ben non, même pas, il se contente de me mépriser gentiment.... Merde, je vais bientôt réussir à émouvoir un taxi de nuit... C'est à ce point là ?

Je pensais avoir la tête du lendemain de fête, pas celle qui fait émeut à un chauffeur G7. D'un autre coté, à quoi je pouvais m'attendre ? Ca sert à rien de jouer au mec surpris... Je paye l'addition... Seulement, ce coup-ci la note est salée, j'ai fait sauter mon plafond visa!

[Want more ? It's coming bitch...]

2 commentaires:

Anonyme a dit…

un esprit affuté par la réalité une plume enlassé d'affection, un ton investi mais pas acharné à lire et même relire;

Jocelyn Beaumont a dit…

Merci!